mercredi 5 septembre 2012

Marcinelle, 1956 de Sergio Salma

Salma © Casterman 2012
8 août 1956. Un incendie se déclare dans la mine du Bois du Cazier, à Marcinelle. 262 mineurs perdent la vie dont 132 de nationalité italienne. C’est la pire catastrophe industrielle de l’histoire de la Belgique. Dans ce roman graphique en noir et blanc, Sergio Salma raconte ce jour funeste. Mais pas seulement. Il fait aussi revivre le travail harassant, répétitif et dangereux des gueules noires. Surtout, à travers le personnage de Pietro, immigré atypique peu nostalgique de son Italie natale, il prend à contre-pied la figure classique de l’ouvrier viscéralement attaché à ses racines. Pour Pietro, son pays est celui qui lui donne à manger. Peu importe que ce soit la Belgique ou le royaume de Zanzibar ! Et même s‘il retourne chaque été voir la famille, même s’il roule en Vespa et qu’il passe chaque dimanche avec sa communauté autour d’une grande tablée, il voit son avenir et celui de son fils sous la pluie et le ciel bas du plat pays qui est devenu le sien.    

Salma ne donne pas dans l’autobiographie. Son père (italien) n’a jamais été mineur et lui-même est né en 1960. Il a néanmoins grandit à Fontaine-l’Evêque, près de Charleroi, à moins de 500 mètres d’un puits d’extraction. Son récit mélange donc des souvenirs d’enfance et une solide documentation. Beaucoup de finesse et d’intelligence dans son propos qui ne se limite pas à un hommage rendu au monde de la mine. Avec Pietro, il navigue entre mémoire familiale, instants de vie privée, questionnement sur la place des immigrés dans la société et réflexions sur le déracinement.    

Coté dessin, l’épaisseur du trait donne de la profondeur aux planches en noir et blanc. Les nombreuses séquences sans textes racontent quant à elles mieux que de longs discours la pesanteur des habitudes au fond de la mine. Le découpage simple et les courts chapitres rendent l’ensemble dynamique et très agréable à lire. En fin d’ouvrage, un dossier rédigé par le journaliste Morgan di Salvia met en perspective l’importance de l’industrie charbonnière belge des années 50 et apporte des précisions sur le déroulement de la catastrophe et son retentissement.    

Une belle réussite que je recommande chaudement.

Marcinelle, 1956 de Sergio Salma. Casterman, 2012. 255 pages. 17 euros. 


Salma © Casterman 2012


20 commentaires:

  1. Comme ça se déroule en Belgique (et pas au Zanzibar :) ) et que tu as aimé... je note !

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  2. A lire donc. Merci pour ton article Jérome ;)

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    1. Forcément, je ne vois pas comment tu pourrais passer à coté de cet album !

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  4. Ce n'est pas un peu lourd comme histoire...?

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  5. J'aime bien les bd qui partent d'un événement historique, donc je note. Et les dessins en noir et blancs ont l'air pas mal du tout!

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    1. Je ne suis un grand fan du noir et blanc donc je ne peux qu'être d'accord !

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  6. On en parle encore en Belgique, de cette catastrophe minière !!

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    1. Oui, un musée à même été construit sur les lieux de la catastrophe.

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  7. Cela me parle et me touche forçément...mon papa était mineur de fond...dans cette mine entre autre où l'on constuit en ce moment le Louvre-Lens...trop content et fier pour lui...je note donc...merci...

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    1. C'est album est vraiment fait pour toi. Si tu venais à le lire, je me ferais un plaisir de découvrir ton avis.

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  8. Pareil que Nahe, surtout que j'ai visité Le bois du Cazier il y a quelques années.

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  9. Je l'ai enfin lu et j'ai beaucoup aimé! J'en parlerai courant décembre! Merci encore pour ce choix au Lot BD! :-)

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    1. Je suis content que tu aies aimé, j'avais quand même quelques doutes.

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  10. d'ailleurs si ça t'intéresse voici mon billet ; http://ennalit.canalblog.com/archives/2013/12/12/28604892.html

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