jeudi 26 septembre 2013

Faillir être flingué - Céline Minard

Des cow-boys, des indiens, des voleurs de chevaux, des chariots dans la plaine, des danseuses de saloon… Brad, Josh, Jeffrey, Elie, Zébulon, Sally et les autres. Une multitude de personnages convergeant volontairement ou pas vers une ville champignon sortie de nulle part : « Une rue longue d’environ 600 mètres, bordée de part et d’autre de tentes et de baraques en planches plus ou moins solides. » La naissance d’un monde neuf ou chacun aura sa chance, quel que soit son turbulent passé.

Tous les clichés possibles s’empilent (attaque de la diligence, saloon tenu par une maquerelle, chinois blanchisseurs…)  et pourtant l’image mythique du western ne cesse d’être bousculée. Céline Minard a à l’évidence pris beaucoup de plaisir à tricoter cet univers à la fois décalé et respectueux des codes du genre. Et c’est surtout parce qu’elle maîtrise à la perfection ces codes qu’elle peut se permettre de les chahuter comme bon lui semble. Elle est tellement à l’aise dans cet environnement si cloisonné que l’on a parfois envie de hurler : « Dorothy M. Johnson, sors de ce corps ! ».  Il suffit de voir la facilité déconcertante avec laquelle elle parvient à installer une ambiance « typiquement western » : son saloon a l’odeur du tabac froid et du whisky bon marché, sa prairie verdoyante résonne du bruit des sabots des chevaux indiens et quand on s’assoit sur le fauteuil du barbier, on sent la douceur de la mousse à raser et la pression du coupe-chou sur notre carotide. Une écriture descriptive à la précision diabolique qui plonge le lecteur en pleine immersion.  Que ce soit dans les passages contemplatifs où lors de scènes d’action trépidantes, tout sonne terriblement juste. Même le final, nerveux à souhait, que l’on attend crépusculaire et tragique, se termine sur une pirouette inattendue.

Du souffle, un hymne poétique à la nature sauvage, des personnages incarnés et des destins croisés… pas de doute, Céline Minard est bien une virtuose.

Faillir être flingué de Céline Minard. Rivages, 2013. 325 pages. 20 euros.

L'avis d'Hélène





36 commentaires:

  1. Je me réjouis de l'avoir à portée de main, tu n'es pas le seul à être élogieux sur ce western littéraire. Une des grandes surprises de la rentrée, je pense.

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  2. On dirait que c'est l'unanimité autour de ce roman, en tout cas pour le moment. Je ne suis pas très western, je ne vais pas me précipiter.

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  3. Un bon western avec de bons cow-boys ! j'aime !

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  4. Le coup du barbier c'était grandiose, clin d'oeil appuyé à Sergio le grand :-) tout à fait réjouissant ce livre, au début on se demande bien où on va (je ne suis pas très western littéraire moi-même) mais ensuite quel plaisir :-)

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    1. Oui ça part un peu dans tous les sens au début mais au final c'est un régal.

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  5. Plein de choses à lire avant de pouvoir envisager d'aller caracoler dans les plaines du Far West... mais je note ton enthousiasme!

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  6. Noté ++ et je file le lien à un copain...

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    1. C'est le genre de référence qui peut plaire aux copains.

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  7. Repéré à cause de l'auteur, donc bien avant les enthousiasmes. Il sera à la bibli, ce bouquin, patience.

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    1. Tu peux être sûre en effet qu'il sera à la bibli un jour ou l'autre.

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  8. J'ai failli l'acheter il y a quelques jours...

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    1. Ben alors, il fallait... en même temps je ne sais pas si ça te plairait.

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  9. Déjà noté, même si le titre m'avait un peu rebuté au départ... Je ne vais pas m'arrêter au titre, hein !

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    1. Manquerait plus que ça que tu t'arrêtes au titre. Non, mais !

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  10. C'est le genre de livre qui me ferait me détourner en librairie mais ton avis me pousse à le noter (oui tu m'obliges quasiment là^^) ! on verra lors de la prochaine descente ! En tous cas elle t'a ferré au lasso, Calamity !

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    1. Oui, elle m'a ferré au lasso comme tu dis, et ce fut bien agréable !

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  11. Ca c'est exactement le genre de bouquin sur lequel j'aimerais tomber en bibliothèque !! Jamais lu Céline Minard, ça commence à devenir une sérieuse lacune.

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    1. Je te rassure moi je n'en avais jamais entendu parler avant.

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  12. "un hymne poétique à la nature sauvage" - aaaaaaah au secours ! Je sens que c'est totalement le créneau de Keisha par contre, avec l'ambiance western en plus.

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    1. Pas ton truc la nature sauvage ? Alors en effet tu peux crier "au secours !"

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  13. J'aime beaucoup le western, roman et ciné, mais je n'aime pas du tout Céline Minard. J'ai détesté le livre que j'ai lu d'elle ("Le dernier monde") et elle m'insupporte à chaque fois que je l'entends dans des émissions littéraires à la radio (et en ce moment, elle les fait toutes !).

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    1. Perso, je ne l'ai jamais entendu et je ne l'avais jamais lu donc je partais sans à priori.

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  14. Bon, je ne suis pas western du tout, ce n'est pas ce que je recherche quand je pars à l'Ouest, mais curieuse, et ta dernière phrase est particulièrement convaincante.

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    1. Si tu n'es pas western du tout, ça risque quand même d'être difficile. C'est un pur western ! Mais l'exercice littéraire (sa maîtrise surtout) vaut le coup d’œil.

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  15. on m'en a dit que du bien de ce livre, j'ai lu des articles élogieux. Je m'y suis donc précipité ... j'aurais voulu aimer...et surtout comprendre. Je m'y suis noyé. Peut-être à reprendre plus tard !

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    1. Il y a tellement de personnages... on peut vite perdre pied.

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  16. Ah toi aussi, tu sentais qu'il y avait un autre corps à l'intérieur ... Moi, ça y est, en fait, je suis réincarnée en chinois blanchisseur. Un bouquin génial, donc, en tout objectivité ...

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    1. Moi je me verrais bien dans la peau de Zébulon. Et pas seulement pour Sally (quoique...).

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