vendredi 26 septembre 2014

Je reviens de mourir - Antoine Dole

Il suffit de trois fois rien pour me donner envie de lire. Entendre Stephie et Noukette parler d’un roman coup de poing par exemple. Du genre « J'en suis encore le cul par terre moi, véridique... Fini il y a un petit quart d'heure et je sens qu'il va longtemps me hanter... Quel roman nom de Zeus !! » (Noukette) ou « Un titre qui tabasse. Je pense bien que c’est la première fois que je lis quelque chose comme cela. » (Stephie). Elles ont ce don de me donner envie, je n’y peux rien (envie de lire, hein !). Du coup j’ai regardé si ce roman était disponible dans le réseau des médiathèques de ma ville. Il y était. Je me suis donc précipité pour aller l’emprunter. Je l’ai dévoré d’une traite et je peux vous en parler aujourd’hui. Enfin, si j’y parviens, parce qu’avec ce titre, on est au-delà du coup de poing…

Deux histoires s’entrecroisent. D’un coté celle de Marion, folle amoureuse de Nicolas. Au point de tout accepter. Les coups, les clients qu’il lui trouve et auxquels elle s’offre contre une enveloppe pleine de cash. De l’autre celle d’Ève, mangeuse d’hommes qui se perd en rencontres d’un soir, juste pour le sexe, sans jamais laisser la moindre chance aux sentiments. Deux femmes totalement perdues dont les routes vont finir par se croiser, pour le pire…

Ce roman est dégueulasse. Dégueulasse dans la mesure où il s’en dégage quelque chose de répugnant. Physiquement et moralement. Et malgré cela, une fois ouvert, impossible de le lâcher. Pas à cause d’une fascination un peu morbide. Juste parce que le phrasé syncopé d’Antoine Dole vous saute à la gorge et vous décrit l’indicible avec une puissance qui submerge. Il vous fouille les entrailles, gratte jusqu’à l’os et vous met les nerfs à vif.

Incroyable de découvrir un premier roman si mature alors qu’au moment de sa publication son auteur n’avait même pas 30 ans. La façon de décrire la douleur physique et morale de ces femmes est d’une justesse et d’un réalisme à couper le souffle. Aucune facilité, pas de déballage gratuit en dépit des apparences. Les mots se gravent au fer rouge sur la rétine, vous mettent mal à l’aise, vous laissent au bord de la nausée. C’est cru, c’est extrêmement violent, c’est d’une noirceur absolue, c’est l’expression du désespoir et de la solitude comme je ne l’ai jamais lue. C’est une fin que l’on ne voit pas venir, sur laquelle on réfléchit longtemps après avoir refermé le livre. On cherche alors à rembobiner le fil du récit pour retrouver les indices et l’évidence apparaît : il ne pouvait pas en être autrement.

Je ne veux pas en dire plus, je me demande même si je n’en ai pas déjà trop dit. C’est un roman que l’on doit se prendre de plein fouet, sans en savoir trop à l’avance. Une expérience de lecture intense et qui bouscule. Vraiment très, très fort !

Je reviens de mourir d’Antoine Dole. Sarbacane, 2014. 135 pages. 10 euros.

Une lecture commune dans laquelle m'a embarqué ma binômette préférée. Ce n'était pas prévu au programme mais, comme d'habitude, elle a su trouver les bons arguments...

L'avis de Stephie

Extraits :

« Il l’a gardé six mois au fond de lui, petit diable dans sa boîte à l’intérieur du ventre. Juste attendre que l’hameçon soit profond dans mon cœur, bien ancré dans mes chairs, pour faire jaillir le monstre. Patient, pour voir si je n’étais pas le genre de filles cinglée qui s’emballe trop vite. Être sûr que je serais prête à tout. Et je l’étais, clair que je l’étais. »

« Il ne franchit pas la limite, il la repousse, et plus j’accepte, plus je dois accepter. Si notre histoire s’arrêtait j’aurais peur de réaliser tout ce qu’il m’a fait. Tout ce que j’ai fait. Ne pas formuler le gâchis. »







50 commentaires:

  1. J'ai un peu peur d'être trop secouée.
    J'attends.

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  2. Militons pour une sortie de ce titre dans un format pour adultes. C'est un roman qui le mérite et qui y trouverait davantage ses lecteurs. La plume de cet auteur est d'une force, la vache ! Et j'aurais aimé une photo de la miss, là, le cul par terre ;)
    Et puis tu sais que c'est ma semaine coup de projecteur... Je serais honorée que tu mettes mon ptit logo :)

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  3. Tout m'a sauté à la gorge dans ce roman, dès les premières lignes. Je ne compte plus le nombre de phrases que j'ai relues, atrocement belles... Franchement, ce mec a un putain de talent...

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    1. On est d'accord, il a beaucoup de talent. Mais punaise, il n'y va pas de main morte !

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  4. BrrRrrRrrR.... qui gratte jusqu'à l'os... je vois tout à fait ce que tu veux dire... Ce sont des expériences de lecture dont je ne veux pas absuer mais de temps en temps, je les trouve nécessaires. Je suis contente d'avoir cédé à la tentation après lecture du billet de Stephie. Avec ton billet, je trépigne juste pour qu'il arrive enfin dans ma BAL !
    Des bisous et bon week-end (bientôt :D )
    Cajou

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  5. Je ne suis pas sûre que ce soit le genre de lectures dont j'ai besoin en ce moment... on verra plus tard !

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    1. Disons qu'il ne faut pas être trop fragile pour "affronter" ce texte.

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  6. Livre coup de poing et commentaire qui prend aux tripes, genre boîte noire où on enfonce la main sans savoir ce qui va vous mordre. A couper le souffle. Comme le roman?

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    1. Il y a de ça, la fin du roman peut vous laisser le souffle coupé.

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  7. Difficile de commenter, mais je vais le lire.

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  8. à la première lecture de ton billet, ça m'évoque Monster ou Baise-Moi...il a l'air très fort ce roman (il fait un peu peur aussi...)

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    1. Niveau écriture, pour moi, il n'y a pas photo avec Despentes...

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  9. ah que je comprends ton avis car j'ai eu la même la réaction à la fin de ma lecture. je m'en souviens très bien et c'était il y a plus de 5 ans... une claque ! vraiment !

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    1. Une claque, c'est vraiment l'impression que l'on a à la fin.

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  10. Si même toi tu es sur le cul !!! Il me le faut !!!!

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  11. Comme vous savez être convaincants, Noukette et toi !!!! Il me le faut !

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    1. Quand on aime vraiment, on essaie forcément d'être convaincants ;)

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  12. Réponses
    1. Si tu as autant de chance que moi, tu pourras le trouver à la médiathèque.

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  13. Franchement je ne pense pas pouvoir le lire ...

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  14. C'est grâce à toi que j'ai découvert cet auteur, avec "A copier 100 fois", énorme petit roman. Mais là, je crois que je vais avoir du mal avec le sujet...

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    1. Un très grand souvenir aussi "a copier 100 fois". 'est vraiment un auteur que j'aime beaucoup. Et pour l'avoir rencontré, il est adorable en plus.

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  15. S'il croise mon chemin, je me jette dessus.

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  16. Houlà, là je note même si je ne suis pas sûre d'avoir si envie de le lire, j'aime être bousculée de temps en temps, ça nous sort de notre ronron certes agréable mais quand même...

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    1. Ah ben là, tu vas sortir de ton ronron, c'est certain !

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  17. Déjà, ton billet prend aux tripes alors j'imagine le bouquin !

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    1. Le bouquin est bien meilleur que mon billet, heureusement !

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  18. Dans la wish DIRECT ! Et même mieux, déjà commandé:D

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  19. bon entre toi, stephie, noukette, c'est mort, je me laisse embarquer, même si ce roman est dégueulasse :-)

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    1. Laisse-toi donc embarquer, tu ne le regretteras pas !

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  20. Arf, pas sûre que ce soit pour moi mais tu es diablement convaincant.^^

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  21. Avec un billet comme celui-là, difficile de ne pas noter !

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  22. rho la la, "violence insoutenable" non vraiment je préfère passer mon tour, même si tout est bien ficelé, je suis trop chochotte ;-)

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  23. Pourtant, avec ton adjectif "Dégueulasse" ce n'était pas gagné.

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    1. Non, rien n'était gagné au départ. Mais quel roman !

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  24. Tu en as dit juste ce qu'il faut pour donner envie (de le lire bien sur !) moi aussi je sonde le réseau médiathèque du coup !

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  25. Mercredi je suis donc allée à la bibliothèque et l'ai emprunté. Je viens de le lire, d'une traite, écoeurée vraiment et fascinée effectivement par la plume d'Antoine Dole certes mais aussi par l'humanité qui est présente derrière son texte, son premier roman bon sang! Je ne sais pas, je ne pense pas que le moment était bien choisi, fragile en ce moment. je ne sais pas si j'écrirai tout de suite un article sur ma lecture car cela signifie me replonger dedans. Je pense le relire plus tard et ne comprends pas vraiment sa place en jeunesse. Merci Jérôme vraiment même si cela m'a trop remuée. là ce n'est plus une claque mais un coup de poing en pleine figure, une droite que je ne suis pas prête d'oublier tout comme cet auteur que je découvre à travers deux romans en une semaine!

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    1. Je pense que tu as retenu l'essentiel : l'écriture incroyable, l'humanité derrière chaque mot et le 1er roman bon sang !
      Je suis content de t'avoir incitée à le lire même s'il t'as beaucoup (trop ?) remuée. La littérature qui nous sonne comme un coup de poing, c'est bon aussi parfois.

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