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mardi 6 juillet 2021

Melvin T3 : Melvin Gold - Artur Laperla

Pas la peine de tourner autour du pot, la couverture suggestive en dit beaucoup : Melvin a un gros paquet. Un gros paquet bien moulé dans son pantalon serré, qui ne laisse personne indifférent. Alors quand il arrive à la ferme des sœurs Wondershake, son sac sur le dos, le colosse est accueilli à bras ouverts (et il n’y a pas que les bras que les frangines vont lui ouvrir en grand). 

Problème, Melvin a fait des siennes avant de débarquer à la cambrousse. Il a notamment dévergondé la femme, la fille et la maîtresse de Patrick Bullshit, un escroc notoire qui l’a très mal pris, au point d’engager un tueur à gage pour se débarrasser de notre Don Juan monté comme un âne. Du coup, pendant que Melvin épuise les filles de la campagne, le danger se rapproche…


Il est marrant ce petit album à réserver à un public averti. Un format poche presque carré et un héros mutique qui préfère s’exprimer à coups de reins plutôt qu’avec des mots. La nature a été généreuse avec lui et ça tombe bien car le bonhomme est très généreux par nature. Ici les filles n’ont pas froid aux yeux et, en dehors de Melvin, les hommes sont tous des timides, aigris ou cul-serré sans cervelle. C’est distrayant, rigolo, sans prétention mais réalisé avec application. Une lecture de vacances parfaite pour s’émoustiller avant une sieste crapuleuse. 

Melvin T3 : Melvin Gold d’Artur Laperla. Bang Editions, 2021. 140 pages. 10,00 euros.








mardi 6 avril 2021

Ragnagna et moi - Ken Koyama

On sonne à la porte. C’est le jour, c’est l’heure, Ragnagna débarque. Un mois déjà depuis sa dernière visite. Comme d’habitude, elle cogne dur, souvent sous la ceinture. Pas sa faute, c’est son job. Après avoir maltraité sa cliente du jour, elle sort sa seringue et lui prélève une bonne dose de sang, la laissant sur le flanc. Le mari rentre, salue l’intruse mensuelle et lui propose de rester pour le dîner. Quand il se plaint de voir dans son assiette la même chose que la veille, Ragnagna lui file une torgnole pour bien lui faire comprendre que les règles ça épuise et qu’il ferait bien de laisser madame tranquille s’il veut éviter les ennuis.  

© Ki-oon 2021 Koryama

Elle est comme ça Ragnagna. Pénible, douloureuse, déterminée à mener à bien sa mission malgré les désagréments que cela implique. Appliquée mais compréhensive, prête à soutenir celles qu’elle fait souffrir. A les défendre aussi, contre les hommes et leur saleté de libido qui vient les embêter quand c’est pas le moment. Chaque chapitre est une histoire indépendante. Les premières règles, les dernières règles et l’adieu à Ragnagna après des années passées ensemble, la fatigue, le manque de peps, la baisse de productivité au boulot, les femmes d’autrefois traitées comme des pestiférées chaque mois à la première goutte de sang, l’arrivée des serviettes hygiéniques au Japon, sans oublier Miss SPM (syndromes prémenstruels, la petite sœur de Ragnagna), tout ou presque y passe.

Je vois déjà venir les rageux qui vont reprocher à l’auteur d’être un homme. Les spécialistes de l’indignation surjouée toujours prêt à s’offusquer. De quoi se mêle-t-il ? Quelle est sa légitimité ? Comment peut-il parler d’un sujet qui ne le concerne pas directement ? Un peu comme un auteur jeunesse que l’on clouerait au pilori parce qu’il n’a pas d’enfant. Ou un traducteur blanc à qui on confierait les poèmes d’une autrice noire. Condamner à priori. En jugeant un statut avant des compétences. Bêtement. Bref, je m’égare, les bas du front qui refuseront de découvrir ce manga sur les règles parce que son auteur est un homme, grand bien leur fasse. Pour les esprits un peu plus ouverts (un peu plus éclairés oserais-je dire), l’expérience vaut le détour, promis. 

Je reconnais que graphiquement ça fleure bon l’amateurisme du gars ayant séché l’école des beaux-arts mais ça ne nuit en rien au plaisir de la lecture. Il y a même un petit tuto en fin d’ouvrage pour apprendre à dessiner Ragnagna. Au-delà de l’aspect esthétique, le sujet est traité à la fois avec sérieux et légèreté. Surtout, avec beaucoup de respect et de tendresse pour les femmes qui ont affaire à Ragnagna tous les mois. C’est hyper didactique, parfois très drôle, toujours plein d’empathie. Un petit manga qui ne paie pas de mine mais qui se révèle au aussi instructif que décomplexé. A mettre entre toutes les mains (filles et garçons bien sûr), dès le collège. 

Ragnagna et moi de Ken Koyama. Ki-oon, 2021. 220 pages. 15,00 euros.




Aujourd'hui chez Stephie c'est permis !






mardi 2 mars 2021

Fantasmes T3 : les jeux interdits - Stefano Mazzotti

Ça ne m’est jamais arrivé d’être attiré à la cave par une voisine pour une partie de jambes en l’air (en même temps j’ai pas de cave).
Ça ne m’est jamais arrivé de profiter de la femme du conducteur après avoir été pris en stop (en même temps j’ai jamais fait de stop).
Ça ne m’est jamais arrivé d’être enfermé dans les chiottes d’un avion avec une épouse voulant faire payer à son mari ses infidélités (en même temps je ne connais pas d’endroit moins sexy que les chiottes d’un avion pour faire des cabrioles).
Ça ne m’est jamais arrivé qu’une jeune et jolie fille lavant le pare-brise de ma voiture à un feu rouge se mette à se masturber sur le capot (en même temps je suis tout le temps à pied et c’est ma femme qui a la voiture).   
Ça ne m’est jamais arrivé, un soir en rentrant du boulot, de tomber sur la jumelle de ma femme qui, se faisant passer pour sa sœur, m’entraine dans la salle de bain pour quelques galipettes (en même temps ma femme n’a pas de sœur jumelle).

© S. Mazzotti -
Delcourt 2021

Bref, toutes les situations décrites ci-dessus relèvent du fantasme, ce qui est parfaitement raccord avec le titre et le contenu de cet album. Des fantasmes donc, déclinés en historiettes de quelques pages au contenu on ne peut plus explicite. Oui, parce qu’autant le dire tout de suite, le gros plan est ici de mise et les anatomies sont visibles sous les moindres coutures. On ne perd donc pas de temps en futilité : quelques cases d’exposition et on rentre dans le vif du sujet (c’est le cas de le dire !). 

Un album résolument porno donc, à ne pas mettre entre toutes les mains. Le dessin est archi classique (pour ce genre du moins), hyper réaliste, presque froid car au bout du compte il ne laisse aucune place à la suggestion et à l’imagination. Au final rien de transcendant. Du déjà-vu, de l’anecdotique, bien réalisé mais visuellement un peu daté et sans originalité. Dernier bémol, la couverture est trompeuse pour les adeptes de sexualité entre filles car les histoires présentées sont 100% hétérosexuelles.

Fantasmes T3 : les jeux interdits de Stefano Mazzotti. Delcourt, 2021. 70 pages. 16,95 euros.



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mardi 7 avril 2020

Arthur Cauquin au Yémen - Alain Bonnand

Avril 2006. Arthur Cauquin, expatrié au Yémen avec femme et enfants, travaille pour une grosse multinationale. Laurence, célibataire et fonctionnaire, vit à Orléans. Arthur et Laurence se sont rencontrés pendant un séjour d’Arthur dans le Loiret. Depuis, c’est l’amour fou et leurs échanges se font par écrans interposés. A distance, ils entretiennent la flamme de leurs désirs réciproques. Des mots, des images, des situations, des confidences pimentent leur relation dans l’attente de leurs prochaines retrouvailles.

Laurence n’est pas farouche, Arthur est volontiers prêteur. Plutôt que de se morfondre, la plantureuse quinqua multiplie les expériences avec des hommes venus de tous horizons, sans jamais renier son amour fou pour Arthur. Celui-ci l’incite d’ailleurs à ne pas se laisser abattre et l’encourage surtout à lui raconter ses « exploits » dans les moindres détails. Il se permet même de se faire passer pour la belle sur des sites de rencontre afin de lui choisir les étalons qu’il estime les plus à même de la satisfaire. Une drôle de relation, certes étrange, mais qui n’apparaît en aucun cas malsaine à la lecture de leurs échanges.

Rien de tordu ou de pervers donc, simplement l’expression de jeux érotiques d’adultes consentants à l’aise dans leur sexualité qui cherchent à s’émoustiller réciproquement. L’écriture a un petit quelque chose de suranné qui lui donne beaucoup de charme. Entre Arthur et Laurence point de sextos bourrins et sans fioritures accompagnés de gros plans ne laissant aucune place à l’imagination. Ici la vulgarité n’est pas de mise, le langage se veut soutenu et le propos donne davantage dans la suggestion que dans la description pornographique sans finesse.

Une lecture rafraîchissante, Alain Bonnand retrouve l’esprit de l’excellent « Il faut jouir Edith », on sent à quel point il a lui-même pris plaisir à imaginer les discussions de ses tourtereaux. A moins que rien de cela n’ait été inventé…

Arthur Cauquin au Yémen d’Alain Bonnand. Serge Safran éditeur, 2020. 220 pages. 17,90 euros.


PS : compte tenu des événements actuels, la sortie du roman prévu le mois dernier a été repoussée à début mai. Une version numérique est néanmoins disponible à tout petit prix, il serait dommage de s’en priver.

Une lecture commune partagée avec Noukette.



Le 1er mardi c'est toujours permis chez Stephie










mardi 4 février 2020

Confession sexuelle d’un anonyme russe

Drôle de texte. Cette autobiographie sexuelle anonyme fut envoyée par un ukrainien au psychologue anglais Havelock Hellis, considéré comme l’un des pères fondateurs de la sexologie. Ce dernier la publia en appendice du sixième tome de ses « Études de psychologie sexuelle ». Censé avoir été écrit directement en français en 1912 par un homme né dans les années 1870, ce témoignage est pour Ellis « un exemple d’expériences singulières et une preuve du mal que peut faire la perte ou la diminution, en matière sexuelle, du contrôle de soi. »

L’anonyme en question, fils unique d’une famille bourgeoise de Kiev, dresse le portrait de sa vie sexuelle de la petite enfance à l’âge adulte. Ce faisant, il décrit par le menu les nombreuses expériences ayant jalonné son parcours. Enfant naïf déniaisé par des fillettes à peine plus vieilles que lui mais bien plus dégourdies, il connaîtra au cours de son adolescence un nombre incalculable d’aventures, tant à l’école que pendant ses vacances à la campagne. En grandissant l’ingénu va côtoyer des femmes mûres, de la servante culbutée à la hussarde entre deux portes à la femme mariée délaissée par son époux en passant par des étudiantes toujours partantes pour une partie de jambes en l’air. Frénésie sexuelle de l’adolescence, chasteté absolue entre 20 et 32 ans, addiction à la masturbation, maladies vénériennes et fréquentation de jeunes filles pré-pubères après son installation en Italie, aucun événement n’est épargné au lecteur.

Loin du simple catalogage, son cheminement érotique donne moins dans la description suggestive que dans l’examen froid et psychologique de chaque expérience. Le résultat est surprenant, mêlant naïveté pleine de fraîcheur et analyses quasi-médicales. Le coït dans toute sa variété est décrit en grec ou en latin, chaque position devenant pour ainsi dire un objet d’étude scientifique.

Un texte aussi étonnant que dérangeant. La préciosité de l’écriture est en permanence contrebalancée par des visions extrêmement crues débordant de détails anatomiques d’une précision chirurgicale. Le témoignage n’a au final rien de croustillant, il sombre même dans le malsain à plusieurs reprises à cause de la lourde insistance sur la supposée précocité sexuelle des fillettes, surtout dans la dernière partie du récit lorsque le narrateur devenu adulte fréquente de beaucoup trop près des enfants d’une douzaine d’années. Beurk !

Une autobiographie sexuelle possédant certes des qualités littéraires evidentes mais dont le contenu m'a plus d'une fois mis mal à l'aise, c'est rien de le dire.

Confession sexuelle d’un anonyme russe. Allia, 2009. 160 pages.





Le premier mardi, c'est chez Stephie !





















mardi 7 janvier 2020

Petites luxures : histoires intimes

Point de départ de ce projet, le compte instragram Petites Luxures où l’illustrateur Simon Frankart combine avec talent sexe, dessins et jeux de mots souvent très oulipiens. Pour célébrer le passage à un million d’abonnés, il a demandé à ces derniers de lui raconter en 100 mots une anecdote marquante de leur vie amoureuse ou sexuelle. Sur les neuf cents histoires reçues, cinquante ont été sélectionnées pour être publiées en recueil. Des histoires érotico-poétiques vécues et écrites par des hommes et femmes du monde entier acceptant de livrer un tout petit rien de leur intimité.

Le livre est superbe vu de l’extérieur. Couverture en tissu d’un rouge flamboyant, papier ivoire plutôt épais, noir et blanc profond des illustrations. Le problème c’est qu’il faudrait rester à la surface, parce que quand on plonge à l’intérieur, il y a de quoi vite déchanter. Pas au niveau du dessin, le minimalisme et l’inventivité de chaque illustration étant souvent bien plus suggestif que l'anecdote à laquelle elle est associée. C’est là tout problème, le corpus de textes n’a rien de folichon. Une fellation dans un ascenseur ou un cuni au bord de la piscine, du sexe par écrans interposés, un bain de minuit coquin, une partie de jambes en l’air dans la cabine d’une péniche, etc. C’est varié  mais plutôt cliché et ça ne m’a pas déclenché le moindre frémissement sous la ceinture.




Le problème majeur, c’est que tout est trop condensé, tout manque d’épaisseur et de longueur (deux éléments importants l’air de rien). Dans chaque histoire on ne fait que survoler les choses, on papillonne et au final on ne retient rien de ces confessions intimes pour la plupart extrêmement classiques. En gros, ça se révèle aussi frustrant qu’une éjaculation précoce après des préliminaires expédiés par-dessus la jambe.

Je ne suis pas contre un petit quickie de temps en temps à la hussarde entre deux portes cochères, mais là j’ai eu l’impression de m’en enfiler cinquante d’un seul coup alors forcément, ça lasse (et puis je vieillis l’air de rien). L’idée de départ était très sympa, dommage que le résultat se révèle si creux et si anecdotique.

Petites luxures : histoires intimes. Éditions Hoëbeke, 2019. 110 pages. 15,00 euros.



























mardi 3 décembre 2019

Le goût du baiser - Camille Emmanuelle

Noukette et moi avons déjà combiné une pépite jeunesse au Premier mardi c’est permis de Stephie avec le documentaire Sexe sans complexe. Nous réitérons l’expérience aujourd’hui avec ce roman déconseillé aux moins de quinze ans contenant des « scènes explicites pouvant heurter la sensibilité des plus jeunes ».

Des scènes explicites, il y en a en effet quelques-unes, mais leur présence ne doit rien à une volonté délibérée de faire du croustillant pour du croustillant. Car le projet de Camille Emmanuelle est bien plus ambitieux que cela. A travers le personnage d’Aurore, elle aborde quelques étapes incontournables de l’entrée dans la vie sexuelle d’une jeune fille. Sans enjoliver les choses mais sans dramatiser à l’excès non plus. L’équilibre n’était pas simple à trouver et le challenge a été relevé de main de maître. 

La qualité de l’écriture n’est pas le point fort de ce roman mais l’essentiel est ailleurs. Suite à un accident, Aurore a perdu le goût et l’odorat. Privée de ses deux sens, son quotidien devient particulièrement handicapant, tant à la maison qu’au lycée. L’absence de ressenti influe grandement sur ses relations aux autres mais aussi et surtout sur son rapport à son propre corps.

L’angle d’attaque est original et se révèle percutant. Aurore se pose de nombreuses questions. Sans expérience, sans repères mais également sans fausse naïveté, elle constate que les garçons peuvent être maladroits, autocentrés ou au contraire particulièrement attentifs à leur partenaire. Elle tâtonne, lestée du fardeau que constitue la perte de ses sens et chaque expérience, bonne ou mauvaise, la renforce malgré son évident manque de confiance en elle.

Il en faut du culot pour mettre en scène une héroïne de roman jeunesse qui se masturbe et ne s’en cache pas, pour la placer dans une situation humiliante sans tomber dans le glauque et pour faire dire à sa meilleure amie que « le cunni, c’est la vie » (en même temps, elle a tellement raison !). Les discussions entre lycéennes ne s’embarrassent pas de fioritures et sont d’un naturel vivifiant (on appelle une bite une bite et une chatte une chatte, point barre). Les culs serrés peuvent s’offusquer, les échanges sont simplement réalistes, crus mais jamais gratuitement vulgaires. Il en est de même pour les scènes « explicites ». Personnellement je valide le choix de descriptions bien plus directes que suggestives, même si là encore, cet aspect du roman pourra faire grincer quelques dents.

Au final, Camille Emmanuelle aborde des sujets fondamentaux dans une vie d’ado. Le regard sur soi et sur les autres, le désir ou son absence, le balbutiement de la sexualité, ces étapes « fondatrices » de la vie sexuelle à démystifier, mais aussi le rapport aux corps des jeunes filles, le leur et celui de leur partenaire, sans oublier la confiance que l’on accorde (ou pas) à ce même partenaire et à quel point cette confiance participe grandement au lâcher prise permettant d’accéder au plaisir.

Ambitieux me direz-vous. Certes mais le résultat est à la hauteur des ambitions, c’est suffisamment rare pour être souligné.

Le goût du baiser de Camille Emmanuelle. Editions Thierry Magnier, 2019. 220 pages. 14,90 euros. A partir de 15 ans.



La pépite partagée avec Noukette





Le premier mardi de Stephie









mardi 4 juillet 2017

Bianca - Guido Crepax

Un gigantesque trip sous acide, voila à quoi me fait penser Bianca. Cette intégrale regroupe l’ensemble de ses voyages oniriques. Pensionnaire dans une institution pour jeunes filles, Bianca plonge chaque nuit après s’être endormie dans un monde où elle passe son temps à se faire attacher, fouetter, caresser, déshabiller ou trainer en laisse. Bianca la soumise est souvent à quatre pattes, Bianca la mutique est une proie entre les mains de celles et ceux qui usent et abusent de son corps, mais Bianca la docile ne serait-elle pas, au final, celle qui mène la danse ?

Guido Crepax a commencé sa carrière en illustrant des pochettes de disques de jazz. Son récit ressemble à une grande impro musicale aussi spontanée qu’incontrôlable laissant l’imaginaire prendre le pouvoir. Sorti en 1970, le premier album de Bianca a tout du délire psychédélique mâtiné de sadomasochisme et saupoudré d’une belle dose de saphisme.

Autant l’avouer, je n’ai pas vraiment compris le but de ce délire. Bon, ok, je n’y ai même rien pigé du tout. Mais on s’en fiche. Car l’essentiel est ailleurs. Dans le noir et blanc élégant et ultra sophistiqué d’un maître de la bande dessinée érotique mais aussi et surtout dans la plastique d’une héroïne à la classe folle. Bianca aimante les regards, elle est le seul et unique centre d’attention, tout ce qui gravite autour d’elle n’est qu’accessoire, tant les personnages secondaires que les décors et l’histoire elle-même. D’ailleurs, pour le regretté Wolinski, Bianca possédait les plus belles fesses de la BD. Perso, je lui préfère celles de Druuna mais clairement, il y a match entre les deux !

Loin d’une pornographie gratuitement bestiale, Crepax privilégie la suggestion et l’esthétique, menant sa barque en toute liberté pour créer un univers délicieusement sulfureux. Culte et incontournable pour les amateurs du genre.

Bianca de Guido Crepax. Delcourt, 2017. 272 pages. 22,95 euros.







mardi 2 mai 2017

Natural Woman - Rieko Matsuura

Un roman en trois longs chapitres, presque des nouvelles pouvant se lire indépendamment et relatant trois moments particuliers de la vie de Yôko, dessinatrice de manga d’une vingtaine d’années. Dans la première histoire, elle se réveille pour la dernière fois près de sa petite amie hôtesse de l’air avec laquelle elle ne s’entend plus. Dans la seconde, elle accompagne une collègue de travail au cours d’un week-end de repos et n’ose pas lui avouer à quel point elle l’attire. Dans la dernière, elle revient sur sa liaison avec Hanayo qui l’éveilla, parfois brutalement, à la sexualité entre filles.

Étrange roman sur la difficulté des relations amoureuses à travers le portrait d’une jeune homosexuelle fragile et hypersensible. Étrange parce qu’à la fois très pudique et très cru, tout en retenu et en même temps n’hésitant pas à décrire de façon précise des ébats souvent proches du sadomasochisme. Yôko se cherche, Yôko aime mais ne sait comment le dire, Yôko subit, cède et agit sous la contrainte psychologique de ses partenaires. Le récit, à la première personne, fonctionne comme un journal intime. Yôko se livre et expose son manque de confiance en elle, sa difficulté à se sentir pleinement femme, à devenir une « natural woman » accomplie et sereine. Les scènes lesbiennes sont totalement suggérées ou parfaitement explicites, toujours déstabilisantes, à l’image de ce livre où le malaise plane en permanence, où le lecteur devient par la force des choses voyeur malgré lui.

Entre désir et répulsion, entre douceur et cruauté, entre lutte effrénée et convergence des sentiments, entre douleur et plaisir, la vie sentimentale exposée de la sorte apparaît aussi fascinante que complexe. Un roman publiée pour la première fois au japon il y a trente ans, assez typique je trouve d’une certaine littérature japonaise underground des années 80 qui, dans le sillage de l’icône Ryu Murakami, n’a pas hésité à s’affranchir de toute forme de classicisme pour bousculer l’ordre établi. Tout ce que j’aime !

PS : Rieko Matsuura a écrit un autre roman dont le titre pour le moins intrigant (Pénis d’orteil) justifie à lui seul que je me penche sur son cas au plus vite.

Natural Woman de Rieko Matsuura (traduit du japonais par Karine Chesneau). Picquier poche, 2015. 192 pages. 7,00 euros.












mardi 4 avril 2017

Parties communes - Anne Vassivière

Reprenons cette affaire depuis le début. L’éditeur annonce la création d’une collection (la collection G.) de romans érotiques pour les femmes et rien que pour les femmes. Je tique un peu mais la curiosité me pousse à y regarder de plus près. Une collection où les auteurs « doivent être des femmes, des vraies, pas des hommes masqués derrière des pseudos féminins ». Pourquoi pas. Et parce que, selon la directrice de la collection Octavie Delvaux, « beaucoup de lectrices attendent plus de la littérature érotique que des contes de fées saupoudrés d’étreintes passionnelles », elle veut défendre « une littérature érotique qui ne prend pas de pincettes pour décrire les actes sexuels ». Avec, ce qui avant le coup me plaisait le plus, des personnages féminins qui ne soient pas « d’éternelles victimes, des nunuches apprenant tout de la vie par un mentor, des femelles qui ne se définissent que par l’image que les hommes leur renvoient d’elles-mêmes ».

Une intention louable, une ligne directrice claire et précise, il y avait tout pour lancer un projet éditorial riche de promesses. Alors peut-on m’expliquer pourquoi le premier ouvrage de la collection est à ce point catastrophique ? Franchement, il y a loin de la coupe aux lèvres. En dehors du titre plutôt parlant et pertinent, je n’ai rien trouvé à sauver dans ce roman. Une succession de points de vue dans un immeuble Haussmannien, des voisins qui prennent tour à tour la parole, qui cachent des secrets, des vies sexuelles tristounettes, des tromperies, des coucheries, des frustrations. Un ramassis de nymphos, de beaufs, de machos, de jeunes, de vieux, d’insatisfaits chroniques et au final, aucun intérêt.

Déjà rien n’est crédible. On se croirait dans un vieux porno à papa. Un regard, un battement de cils, un tortillement du cul en montant les escaliers suffisent à déclencher les hostilités. Le livreur sonne à la porte et c’est parti, le plombier y a droit aussi… affligeant. Ensuite bonjour les clichés : les hommes pensent tous être de bons coups, les femmes comptent les fissures au plafond en attendant que ça se termine et dès qu’elles changent de partenaire, bingo, ça roule ! C’est bien connu, l’herbe est plus verte ailleurs. Cerise sur le gâteau, tout le monde pense au cul 24 heures sur 24. La proprio vieille France se fait tripoter par sa gyneco avant de roucouler avec un jeunot pendant que son mari joue à touche pipi dans l’ascenseur avec la nympho du deuxième étage, le gros macho du premier se tape la gardienne (espagnole et non pas portugaise, n’y allons pas trop fort non plus sur les clichés) avant de se faire enfiler (violer, je ne vois pas d’autre mot) par le célibataire du sixième, debout sur le palier. Et il adore ça le bougre (en même temps c’est bien connu les machos sont tous des homos refoulés). Je m’arrête là dans le ridicule mais je pourrais multiplier les exemples à l’infini.

Juste un mot sur l’écriture. Dans sa note d’intention, Octavie Delvaux prône une exigence de qualité littéraire. Elle réclame « de l’élan, du suspense, de l’émotion. En somme, de la surprise ». Bien, bien, bien. Alors pourquoi la prose est aussi pauvre que gratuitement vulgaire et pourquoi les métaphores navrantes n’engendrent pas le moindre soupçon d’excitation ?

Conclusion : j’ai sans doute commis une erreur fatale en me lançant dans une collection faite par des femmes pour les femmes. Mon instinct de mâle obtus ne m’a à l’évidence pas permis de voir l’or sous le vernis du fumier. J’aurais peut-être dû prendre ce roman au second degré (voire au troisième ou au quatrième) pour l’apprécier à sa juste valeur. Il faut dire aussi que je ne vis pas en appartement, je ne sais donc pas si le fait que tous les habitants d’un immeuble soient de gros obsédés correspond à la norme ou pas. En tout cas dans mon quartier pavillonnaire je ne suis jamais tombé sur une voisine cochonne (vous remarquerez que je ne précise pas « à mon grand regret »). En même temps je vis entouré d’octogénaires, ceci explique sans doute cela.

Mais trêve de digressions, revenons à l’essentiel. Ce roman n’est pas bon. Pas bon du tout. Je ne vois pas en quoi il diffère de ce qui est proposé ailleurs dans le même genre, sauf à considérer que sa médiocrité le singularise du reste de la production. En tout état de cause pour moi, par rapport à l’objectif initial, il y a clairement tromperie sur la marchandise. Ce n’est que mon avis et je vous accorde qu’il ne vaut pas grand-chose mais je le donne quand même.

Parties communes d’Anne Vassivière. La Musardine, 2017. 250 pages. 16,00 euros.

PS : Je vais conclure ce billet par un extrait que je trouve parlant. L’auteure affirme qu’elle s’adresse moins à la raison des lectrices qu’à leur ventre. N’étant pas une lectrice mais un lecteur, je me demande si un paragraphe comme celui-ci remplit cette belle intention.

« J’aime me faire un mec par soir pour me sentir sale et bonne grosse salope jusqu’au suivant. J’aime être la seule de l’immeuble qui se fait enculer et suce après, la vraie salope pur jus de couilles, celle qui chie des bulles de sperme pendant trois jours après une bonne enculade. Et attendre le maximum avant de me laver de la sueur des ébats bestiaux. Et aussi garder la trace argentée du sperme séché qui craquelle la raie du cul, le ventre, les miches, le cou et la joue. Admirable souillure. La preuve tangible et fièrement affichée qu’on m’est passé partout et qu’on s’y est bien affairé. Oui, attendre pour me débarrasser des traces du qualificatif chéri entre tous de "pute", que je m’applique dare-dare à remériter le soir d’après, tous derrière, queues devant. »

Alors, verdict ?











mardi 7 mars 2017

Très intime - Solange

Il y a celle qui est restée vierge longtemps, pas par conviction mais plutôt par manque d’occasions. Celle qui s’est épanouie après trente ans de vie commune et un divorce libérateur. Celle qui a trompé son copain « virtuellement » en envoyant des clichés pornos et en entamant une correspondance très érotique avec un inconnu. Celle dont la libido est en berne, qui voit la sexualité comme l’activité la plus ennuyeuse de la terre. Celle qui a eu plus de deux cents amants. Celle qui n’aime que les filles et n’envisage pas un quart de seconde d’essayer quoi que ce soit avec un homme. Celle qui est un garçon manqué, vulgaire et bordélique, qui a trouvé l’équilibre en se mettant à la colle avec un type doux, posé et raffiné. Celle qui a horreur du cuni, celle qui au contraire adore ça et ne tolère pas qu’un gars se montre dégoutté par la pratique alors qu’il n’a jamais essayé. Celles qui repensent à leur premier contact avec un pénis en érection, celles qui ont testé les plans à trois ou la bisexualité, celle qui entre sur la pointe des pieds dans la ménopause, etc.

Vingt femmes de 18 à 46 ans, vingt témoignages. Solange est la confidente, elle questionne peu, écoute beaucoup. La parole est libérée, touchante ou vindicative. On est dans le très intime qui ne bascule jamais dans le graveleux, on n’est pas là pour exciter le lecteur, on n’est pas là pour se marrer ou se moquer mais pour parler de sa sexualité en toute sincérité et en toute simplicité. J’ai adoré la diversité des profils, la diversité des tons aussi. Le niveau de langue est très différent d’une femme à l’autre, de la beurette au langage des cités à la quadra plus posée, de celle qui se qualifie de « bourrine » à la timide qui s’excuserait presque d’avoir si peu de choses à dire sur sa vie sexuelle. Tous les cas sont particuliers mais il n’y a pas de cas « à part », pas de portraits « extrêmes ». Ces femmes sont à la fois uniques et universelles.

Je dois sans doute être un grand naïf mais je suis par contre effaré de constater, comme l’annonce l’auteure en avant-propos, que parmi ces vingt femmes, « sept ont connu une ou plusieurs situations d’abus et/ou de viol. Une sur trois doit composer avec des traumatismes pour la vie. Certaines minimisent si bien ce qu’il leur est arrivé que je me suis presque laissée berner ».

Je ne connaissais pas la québécoise Solange, qui est apparemment assez célèbre (et appréciée) grâce à sa chaîne Youtube. J’avoue qu’au départ je craignais de tomber sur une simple discussion entre copines ou sur la rubrique sexo d’un magazine féminin où s’enchaînent clichés et jugements à l’emporte-pièce. Pour le coup j’ai eu tout faux et c’est tant mieux.

Très intime - Solange. Payot, 2017. 285 pages. 15,00 euros.








mardi 7 février 2017

Sous les étoiles - Laura Scarpa

Des nouvelles coquines en BD, l’idée me plaisait bien. Avec une femme aux pinceaux, italienne de surcroît, ça sentait vraiment bon avant le coup, surtout quand on connaît la grande tradition d’auteurs érotiques talentueux venus de la péninsule. Rien à dire pour ce qui est de la sensibilité toute féminine émanant de chaque histoire. Entre suggestion et scènes on ne peut plus explicites, on ne tombe jamais dans le porno gratuitement vulgaire ni dans l’eau de rose mollassonne. Il y aussi une grande diversité de thématiques, de décors et de situations. Le réalisme est de mise et chacun pourra se retrouver à un moment où l’autre dans une histoire.

Sexe par téléphone, sexe en plein air ou dans des lieux incongrus, femmes infidèles, coup d’un soir, voyeurisme, premières fois, vie de couple perturbée par l’arrivée de bébé… Laura Scarpa sait varier les plaisirs. Mais dix-sept nouvelles en 80 pages, c’est trop. Ou trop peu. Trop de nouvelles et trop peu de développement dans chaque. Formatées à la base pour être publiées dans une revue, ces coquineries souffrent à l’évidence d’un manque d’ampleur. La pagination réduite donne l’impression que chaque récit est ramassé sur lui-même, qu’ellipses et raccourcis nuisent à la fois à la profondeur du propos mais aussi à sa fluidité, voire parfois à sa compréhension. Dommage, vraiment dommage.

Niveau graphisme, la différence est criante entre les dessins de 1998 et ceux de 2006. Au moins on constate que l’auteure a sacrément progressé mais ses productions les plus anciennes ont du mal à soutenir la comparaison. Après il faut aimer ce trait tout sauf classique, assez undergound, assez typique de la BD indépendante. Personnellement, j’y ai trouvé mon compte sur la forme mais pour ce qui est du fond, on est trop dans le saupoudrage pour me satisfaire pleinement. Sympa sans plus quoi.

Sous les étoiles de Laura Scarpa. Delcourt, 2017. 80 pages. 18,95 euros.




mardi 3 janvier 2017

Noir d’ancre : Le prix de la nouvelle érotique

Un recueil regroupant la nouvelle gagnante du prix de la nouvelle érotique 2016 et dix autres textes sélectionnés par le jury. Créé par les Avocats du Diable, le Prix de la Nouvelle Érotique propose d’écrire une nouvelle inédite à l’occasion du passage à l’heure d’hiver. Une seule nuit donc pour rédiger une histoire et l’envoyer par mail impérativement avant 7h00 le lendemain matin. Un défi littéraire s’accompagnant d’une double contrainte (contexte de situation et mot final identique pour tous, tirés sous contrôle d’huissier) afin d’obliger chaque participant à développer un imaginaire de circonstance.

Pour cette première édition, la double contrainte était « Jamais sans toi, peut-être avec un autre » et le mot final « Ancre ». Entre le samedi 24 octobre 2015 à 23h59 et le dimanche 25 à 7h00, 242 participants se sont pliés au jeu et ont rendu leur copie. Six mois plus tard, le jury annonçait le nom de la lauréate, Isabelle Cousteil, pour son texte « Noir d’ancre ».

Honnêtement, l’histoire gagnante n’est pas ma préférée, loin de là même. Très peu d’érotisme, une esthétique très 19ème siècle avec une petite touche de fantastique en conclusion qui ne m’a pas fait le moindre effet. Après, j’ai beaucoup apprécié l’éclectisme des choix du jury. La variété est de mise et c’est un vrai plaisir de découvrir le classicisme un peu cliché mais efficace de Gilles Milo-Vacéri, l’originalité de Robert Louison avec sa variation autour du potentiel érotique du Petit Larousse, la surprenante chef d’orchestre d’Anne Bourrel, l’amant toujours prêt à se mettre en route de Sylvie Sanchez et même le SM assez poussé mais fort bien mené de Daniel Nguyen. Seul Régis de Sà Moreira et son anecdotique « Va-et-vient » m’ont semblé un cran en dessous.

Et mes lauréats rien qu’à moi ? Et bien j’aurais du mal à départager deux textes qui m’ont vraiment emballé. D’abord le très beau « Kundalini » de Diniz Galhos traitant le thème de la vieillesse tout en sensibilité. Ensuite le saphisme chic, élégant et très émoustillant de Catherine Verlaguet, une auteure de théâtre que j’apprécie depuis quelques années maintenant.

En tout cas, compte tenu des contraintes imposées par le règlement, je salue la qualité des textes produits. L'exercice n'était vraiment pas simple, le résultat est d'autant plus remarquable, au moins pour les onze nouvelles contenues dans ce recueil.

Noir d’ancre : Le prix de la nouvelle érotique. Au Diable Vauvert, 2016. 155 pages. 12,00 euros.










mardi 6 décembre 2016

Le vrai sexe de la vraie vie - Cy

Ce mois-ci, j’étais parti pour lire ça. Une femme, prix Goncourt, qui annonce « Un petit traité d’éducation lubrique », je m’en régalais à l’avance. Sauf que j’ai vite déchanté. En fait j’ai pas compris le but recherché. C’est bien écrit, il y a un vrai sens de la formule et des tas de citations littéraires mais au final le plat servi est bien fade. Quand je me lance dans une telle lecture et que je passe mon temps à piquer du nez plutôt que de me redresser du gland, il y a un vrai problème. Du coup, ni une ni deux, j’ai abandonné à la moitié. Pas pour moi, tout simplement. Et pas la peine d’insister.

Petit traité d'éducation lubrique de Lydie Salvaire. Points, 2016. 120 pages. 10,00 euros.



J’ai donc changé mon fusil d’épaule pour plonger dans cette BD qui m’a bien plus intéressé et accessoirement fait bien plus d’effet, ce qui n’était pas très difficile cela dit. Au moins ici le titre n’est pas trompeur. Le vrai sexe de la vraie vie, c’est un plan à trois pas folichon, c’est ta femme qui te surprend en train de t’astiquer le manche, c’est l’échangisme, c’est le sexe pendant la grossesse, c’est l’amour en mer, pas aussi glamour et excitant qu’on l’avait imaginé, c’est les anecdotes les plus embarrassantes partagées entre amis, c’est l’achat du premier sextoy en boutique. C’est du vrai plaisir et des expériences moins réussies. Protection, complicité, connivence, consentement, désir et amour restent les maîtres mots d’une sexualité qui, même si elle n’est pas forcément épanouie, se vit sans stress et avec simplicité.

Les situations présentées ne sont que des exemples parmi tant d’autres. J’ai d’ailleurs beaucoup aimé la démarche de Cy par rapport à la question. Elle est consciente de ne montrer qu’une infime partie des variations possibles autour du sexe, des « échantillons » comme elle dit. Pas question de rechercher une quelconque universalité, « parlons de sexe, montrons le sexe, et surtout découvrons des sexualités au pluriel, accordées à tous les genres ou à aucun, selon une palette infinie et sans se limiter à seulement cinquante nuances ».  Voila un beau programme auquel j’adhère à 100% !




Du sexe sans complexe et sans contraintes, loin des conventions sociales et des tabous que l’on voudrait nous imposer. Une excellente BD, entre pédagogie et coquineries. Comme quoi, l’alliance des deux est possible.

Le vrai sexe de la vraie vie de Cy. Editions Lapin, 2016. 224 pages. 18,00 euros

Et puisqu'aujourd'hui chez Stephie c'est permis, je partage cette lecture commune avec Noukette (comme chaque mardi ou presque^^).









mardi 1 novembre 2016

Puisque aujourd'hui c'est permis...

Parce que le rendez-vous inavouable de Stephie du mois de novembre coïncide cette année avec la Toussaint, je me suis permis un premier mardi spécial « gros seins ». Tous les livres présentés ci-dessous trônent fièrement sur les étagères de mes bibliothèques (tout en haut, pour échapper aux regards innocents). Ce n'est pas le billet le plus fin de ma carrière, je vous l’accorde, j’espère que vous m’autoriserez à être particulièrement lourd au moins une fois dans l’année, et si ce n’est pas le cas et bien tant pis, vous n’aurez qu’à revenir demain, je vous parlerai de Mickey^^


Un recueil d’histoires courtes qui vaut surtout pour le premier récit, celui de la Comtesse de Frivoli se lançant au cœur de la jungle africaine à la chasse au léopard et se retrouvant, pour son plus grand plaisir, aux mains d’une tribu d’excités. Excitées, les femmes (à fortes poitrines, cela va de soi) le sont toujours dans ce petit livre à l’humour potache et un peu gras où les membres vigoureux et turgescents se donnent sans compter pour assouvir les appétits insatiables de ces dames. Pas follement original mais plutôt bien réalisé.

Merci à Manika pour le cadeau !


Jungle Fever de Douglo. Dynamite, 2014. 50 pages. 9,00 euros.


C'est l'histoire d'une jeune femme qui, un matin, réalise qu'elle n'est plus amoureuse de son compagnon. Elle décide alors de lui écrire une lettre de rupture. Le texte sonne au départ comme une bafouille griffonnée à la va vite et collée sur le frigo mais peu à peu les mots révèlent une ironie mordante, des reproches en cascade et un constat d’échec sans appel.

Le dessin est chic, élégant, vraiment classe et sensuel. Mais l’album se lit bien trop vite et en dehors d’être graphiquement très réussi, il reste au final assez anecdotique.



Darling chéri de Walter Minus. Hachette Comics, 2016. 32 pages. 14,95 euros.


Les Loisirs d’Anna raconte les aventures d’une jeune secrétaire d’apparence toute timide qui, le week-end venu, se transforme en femme fatale assoiffée de sexe. Sa spécialité : offrir des moments de détente torrides à de jeunes salary men surmenés ou à des étudiants ayant sérieusement besoin d’être déniaisés. Sans contrepartie financière ou autre, juste pour aider son prochain. Duo, trio, partouze, la petite n’a pas froid aux yeux, c’est le moins que l’on puisse dire.

Du manga porno classique où les filles ont comme il se doit des poitrines phénoménales. Pas vraiment mon truc mais les amateurs du genre se régaleront.



Les Loisirs d’Anna T1, de Saigado. Taifu Comics, 2009. 220 pages. 8,95 euros.


Dans un monde futuriste à l'abandon, un virus incontrôlable transforme les hommes en mutants assoiffés de sang. Seul le sérum permet d'échapper à la maladie. La pulpeuse Druuna est prête à tout pour obtenir le précieux remède et sauver son amoureux Schastar, gravement atteint. Dans un environnement où le sexe et la violence sont rois, la jeune femme va devoir user de ses charmes pour parvenir à ses fins.

Un chef d'oeuvre de la BD érotique et de la SF. Le graphisme de l'italien Paolo Serpieri est tout simplement incroyable. J'ai découvert cette série au début des années 90, j'avais à peine 15 ans et Druuna a peuplé nombre de mes nuits (et à cause d'elle j'ai aussi tâché nombre de mes draps mais je préfère ne pas m'étendre sur le sujet...).





Druuna T2 de Paolo Serpieri. Dargaud, 1987. 64 pages. 14,50 euros (épuisé et réédité depuis par Glénat mais avec des couvertures bien moins attirantes je trouve)


Trois hommes et une femmes sortent d'un marais avec des scaphandres. Ils retirent leur attirail et se retrouvent entièrement nus, dans une jungle hostile. Ils sont semblent-ils les derniers être humains et les hommes font de la femme leur plus précieux trésor. Logique puisque celle qu'ils surnomment Eve est le dernier espoir de sauver l'espèce. Inspectant les alentours, ils découvrent les vestiges d'une civilisation disparue et finissent par se demander s'ils sont vraiment seuls...

Un classique de la BD érotique que je n'avais jusqu'alors pas eu la chance de découvrir, l'erreur est réparée. C'est étrange, glauque, excitant, mystique, très osé. Le dessin est incroyablement expressif, l'anatomie féminine exposée sous toutes ses coutures. A l'évidence Riverston est bien plus à l'aise pour représenter les femmes que les hommes. Bon, pour être honnête, je suis pas certain d'avoir tout compris, impression renforcée par le fait que l'histoire n'ait jamais été menée à son terme par l'auteur. Mais je dois reconnaître que j'ai vécu une expérience de lecture assez perturbante et rien que pour ça, ça valait la peine.




Nagarya de Riverstone. Dynamite, 2016. 150 pages. 24,95 euros.


Pas vraiment de conclusion à attendre pour clore ce billet, disons juste que les gros seins en couverture, c'est  vendeur (en ce qui me concerne du moins). Et qu'un peu de vulgarité ne fait jamais de mal (en ce qui me concerne du moins).




Tous les participants du premier mardi
sont à retrouver chez Stephie








mardi 4 octobre 2016

Intimidation - Harlan Coben

Voilà, c’est fait, j’ai lu un thriller du grand maître du genre. Enfin il paraît que c’est le grand maître du genre, perso je n’y connais rien en thriller et je passe mon temps à dire que je fuis ce type de roman comme la peste.

Pourquoi cette lecture alors ? Parce que j’ai eu besoin de comprendre. Comprendre pourquoi ce Harlan Coben fascine ma femme à ce point. Pourquoi le soir venu, alors que je l’invite avec toute la conviction nécessaire à faire un gros câlin, elle me snobe pour rester avec Harlan. Et ce n’est même pas une excuse bidon genre « j’ai mal au crâne », non, non, c’est un sincère « attends, je termine mon chapitre » qui s’éternise tellement que je finis par m’endormir en me la collant derrière l’oreille. Donc j’ai voulu savoir ce que ce mec avait de plus que moi. Bordel.

Intimidation, c’est l’histoire d’un secret. Un secret révélé à Adam Price par un inconnu dans un bar. Un secret que sa femme lui cache depuis des années. Après avoir refusé de donner la moindre explication à propos de ce secret, l’épouse disparaît et envoie un mystérieux SMS. Disparition volontaire ? Enlèvement ? Meurtre ? Adam se lance à corps perdu dans une enquête dont il ne sortira pas indemne (je le vends bien, hein !).

La pile d'Harlan Coben au pied de notre lit...


Pourquoi ça fonctionne à ce point ? A vrai dire je me le demande. Ok, il y a un côté addictif. Ok, le gars prend son temps, il soigne les préliminaires, caresse la lectrice dans le sens du poil, la fait frissonner et la réchauffe quand il faut. Il change de point de vue comme on change de position pour offrir une respiration au cœur de l’action avant de mieux revenir aux fondamentaux. Il joue sur le tempo (lent, rapide, trépidant), donne le rythme et offre cette accélération finale qui fait la différence.

Mais punaise, il n'y pas non plus de quoi grimper aux rideaux ! Ça reste un page-turner, un truc dont on dévore les courts chapitres à toute vitesse pour connaître la suite sans s’arrêter sur la profondeur des personnages et de l’intrigue. L’écriture, truffée de dialogues, est plate comme le dos de la main et les grosses ficelles scénaristiques sautent aux yeux, même pour un novice du genre comme moi.

En gros, c’est mécanique : des enchaînements qu’on voit venir de loin, zéro prise de risque, aucune passion. Tout juste se contente-il de faire monter l’intensité crescendo (ce qui est déjà pas mal, je le concède). Pour autant, ce n’est pas parce qu’on a trouvé une technique efficace qu’il est interdit de varier les plaisirs. Où est l‘effet de surprise sinon ? Franchement, monsieur en fait des caisses mais on est à la limite de l’esbroufe. Ok, je suis un peu (beaucoup) de mauvaise foi sur ce coup-là. Mais je déteste l’idée qu’un auteur perturbe ma vie sexuelle, faut me comprendre. L’évidence c’est qu’il sait y faire et que j’ai du mal à soutenir la comparaison. L’enfoiré.

Intimidation d’Harlan Coben. Belfond, 2016. 375 pages. 21,50 euros.